Rémi Burah (Arte) : « La qualité de l’écriture et des scripts est un critère primordial dans nos choix »
Pour sa première rencontre à l'occasion du Festival de Cannes 2016, la SACD a reçu sur son stand Rémi Burah, directeur général délégué d’Arte France Cinéma. Bien que cette chaîne ne soit pas soumise à la réglementation française, elle s’est engagée à investir dans la création cinématographique à une hauteur minimale de 3,5% de son CA.Chaque année, Arte France Cinéma investit près de 10 millions d’euros répartis sur 25 films avec un objectif principal : soutenir les films d’auteur, et un critère essentiel, celui de privilégier la qualité éditoriale plutôt que le potentiel commercial des films. En termes de rentabilité, 20 à 30% des sommes investies par la filiale cinéma remontent via les recettes d’exploitation.
Sur les 25 films qui bénéficient des investissements d’Arte, on trouve 3 films documentaires, un film d’animation, le reste étant constitué des films de fiction. La moitié des films soutenus sont d’initiative française.
La chaîne reçoit environ 400 projets par an et réunit un comité de sélection, composé de 3 femmes et de 3 hommes, 5 fois dans l’année. Avant cette réunion, une présélection est opérée, d’abord par l’équipe de la filiale puisque chaque projet est lu par 2 à 3 personnes, puis par le directeur, Olivier Père, qui sélectionne une douzaine de projets.
Ces projets, soumis au comité de sélection, sont réparties en 3 catégories : les films français d’auteurs confirmés ; les films étrangers d’auteurs confirmés ; les premiers films, français et étrangers. La logique de ce découpage est à la fois d’accompagner dans la durée des parcours d’auteur et de soutenir l’émergence de nouveaux talents.
Un cinéma qui ne soit pas formaté
Au-delà de la volonté de soutenir le cinéma d’auteur, la qualité de l’écriture et du script est primordiale dans les choix qui sont effectués. Il est aussi nécessaire de proposer un sujet fort, avec des personnages incarnés et un cinéma qui ne soit pas formaté. En revanche, ces projets, qui doivent être produits ou coproduits par un producteur français, n’ont pas besoin à ce stade d’être soutenus par un distributeur ou d’avoir un casting. C’est d'ailleurs souvent le financement apporté par Arte qui va convaincre d’autres acteurs d’investir dans un projet.
Arte s’est beaucoup engagée dans le développement d’une offre cinéma sur les plateformes délinéarisées et en télévision de rattrapage. Rémi Burah a notamment cité l’exemple de Ma Loute de Bruno Dumont, sélectionné cette année en compétition officielle à Cannes, pour lequel Arte propose sur sa plateforme http://cinema.arte.tv/fr un making-of accessible aux internautes. Ces plateformes offrent une opportunité pour Arte de faire plus que coproduire un film et notamment d’enrichir l’expérience de l’utilisateur. En termes d’audience en télévision de rattrapage, où Arte propose de revoir les films jusqu’à 7 jours après leur diffusion à l’antenne, l’audience n’est pas encore significative. Cela génère aujourd’hui une audience supplémentaire de l’ordre de 5 à 10 % mais c’est un mode d’accès aux œuvres qui se développe fortement et qui correspond de plus en plus à l’usage de la télévision par le public jeune.
Aujourd’hui, Rémi Burah fait le constat que les films génèrent davantage d’audience qu’avant lors de leur diffusion à l’antenne. Cette amélioration de l’audience semble être le fruit d’une politique éditoriale qui s’est affinée et renforcée autour des films d’auteurs, qui restent souvent des films très présents dans les festivals de cinéma, mais dont la moyenne d’entrée en salles s’est elle aussi accrue. Au début d’Arte, la moyenne d’entrées en salles des films que finançait Arte tournait autour de 50 000 entrées. Désormais, cette moyenne s’établit entre 300 000 et 500 000 entrées.
En matière de financement, Arte peut apporter sur un film 500 000 € maximum : 100 000 € pour l’achat du film ; 150 000€ pour un préachat et pour l’acquisition d’une part de coproduction, le montant peut varier entre 50 000 et 300 000€.
En complément, Arte et ses partenaires Arte France, l’ARD et la ZDF ont décidé de signer un accord de coproduction cinématographique avec la volonté d’apporter chaque année une contribution plus substantielle à 6 films de grands réalisateurs, 3 d’initiative française et 3 d’initiative allemande. Ce sont 300 000 € supplémentaires qui peuvent venir abonder le financement d’un film grâce à ce « grand accord franco-allemand ».