Le service public de l’audiovisuel mérite mieux qu’une réforme comptable
Alors que le Gouvernement vient d’annoncer ses décisions relatives à la transformation de l’audiovisuel public, la SACD déplore le prisme comptable qui semble prévaloir et s’inquiète de l’absence d’ambitions et de visions fortes pour l’avenir d’un service public porteur de valeurs pour la création française et européenne.L’annonce ce jour d’un vaste plan d’économies d’un montant de 190 millions d’euros d’ici 2022, dont 160 millions pour France Télévisions, renforce les craintes d’une réforme uniquement focalisée sur une réduction des coûts, un rétrécissement du périmètre de l’audiovisuel public (2 chaînes supprimées) et un lancement précipité et non-préparé de plateformes numériques.
A cet égard, la promesse politique de sanctuariser les investissements en faveur de la création patrimoniale (fiction, documentaire, animation, spectacle vivant) et cinématographique reste toujours hypothétique tant qu’une disposition législative ne vient pas la consacrer et la graver dans le marbre. C’est pourquoi la SACD demande que désormais, chaque année, le Parlement vote, dans la loi de finances, le montant de l’engagement financier qui devra être affecté par les entreprises de l’audiovisuel public, et France Télévisions en particulier, aux œuvres de création, sans possibilité d’y déroger ni de s’y soustraire.
A ce stade, le plan d’économies annoncé pourrait aussi avoir de graves conséquences sur les rémunérations des auteurs qui sont liées au chiffre d’affaires des groupes publics. Elle invite le Gouvernement - et les entreprises publiques - à y apporter une solution et à trouver un chemin de cohérence. Car, vouloir sanctuariser les investissements dans la production et la création et, dans le même temps, paupériser les auteurs est à l’opposé d’une politique culturelle.
Dans un contexte marqué par des réductions des financements du secteur privé et par des mutations profondes, le service public est plus que jamais le pôle de stabilité de la création. Il doit aussi être son pôle de développement et faire d’une création plurielle, innovante, diversifiée la base de son offre de demain et de sa reconquête, notamment des jeunes publics.
La SACD partage d’ailleurs cette vision avec la Commission de concertation sur la réforme de l’audiovisuel public qui a rendu public son bilan d’étape. En revanche, elle regrette que son travail ait tout particulièrement visé à donner le vernis de la légitimité aux annonces déjà faites le mois dernier et confirmées aujourd’hui par le gouvernement visant notamment à supprimer France 4 de l’offre linéaire du service public. La SACD rappelle que ce projet est à rebours de ce que font tous les autres grands services publics européens qui ont tous fait le choix de conserver au moins une chaîne linéaire à destination de la jeunesse.
Dans une France encore soumise à la fracture numérique et dans laquelle France 4 propose à la jeunesse une offre clairement identifiée, sécurisée, sans publicité et ambitieuse de service public, il est évident que s’en séparer a tout du gâchis. Et ce, d’autant plus qu’aujourd’hui, nulle information n’a filtré sur « le maintien d’une offre linéaire conséquente, avec des créneaux réguliers et identifiés » que la Commission appelle de ses vœux. Il va de soi qu’accompagner et mettre en œuvre la transition numérique ne se décrète pas et ne s’improvise pas.
Les auteurs de la SACD sont les premiers convaincus de la nécessité pour le service public de s’adapter et de se transformer pour répondre aux défis du nouveau paysage audiovisuel et à l’évolution des usages qu’apporte le numérique. Ils sont prêts à être les partenaires de ce changement, d’un changement qui sache porter une offre renouvelée pour les publics, une ambition pour la création, une stratégie pour l’avenir, des perspectives financières crédibles, au-delà des contingences comptables.