Hommage à Gisèle Casadesus
La SACD salue la mémoire de la comédienne, disparue le 24 septembre dernier.Gisèle Casadesus nous a quittés, à 103 ans, après une vie inlassablement consacrée au théâtre, au cinéma, aux auteurs et à leurs créations.
En 2014, la SACD lui a décerné une médaille Beaumarchais, en signe de reconnaissance et d’admiration.
Au nom du Conseil d’Administration, Didier Long lui avait, à cette occasion, adressé le texte qui suit.
Jacques Fansten
« Très chère Gisèle Casadesus, c'est avec joie, respect, émotion et j'ose dire avec tendresse, qu'au nom de la Société des Auteurs, je vous adresse ces quelques mots. S'il est vrai que la grande famille des artistes cède parfois à la fâcheuse habitude d’abuser de superlatifs et de louanger à grand renfort d'envolées lyriques, je ne crains pas aujourd'hui les reproches, tant chacun s'accorde d'une part à penser et à dire que vous les méritez, et d'autre part rêverait secrètement d'être à ma place pour avoir le privilège de les formuler.
Je pourrais à dessein, avec l'assurance de noircir des pages sans être pour autant exhaustif, égrainer votre curriculum vitae, je pourrais citer, avec l'assurance de donner le vertige, les nombreux artistes emblématiques qui jalonnent votre route, mais je ne résiste pas à l'occasion qui m'est offerte de laisser ce soin aux biographes et autre Wikipédia afin de m'adresser directement à vous. Chère Gisèle, le savez-vous ? A la seule évocation de votre nom, les visages s'illuminent de sourires francs, doux et unanimes qui se répondent en écho et votre beau regard lumineux qui regarde vraiment, pétillant de malice et de bienveillance surgit aussitôt dans les esprits. Nos sourires témoignent de notre admiration pour votre parcours de comédienne, exemplaire s'il en est, de par sa longévité bien sûr, mais aussi et surtout parce qu'il est servi par une passion infaillible sans cesse éprouvée, un serment de fidélité à chaque fois renouvelé au plaisir de jouer, de se frotter aux mots des autres, avec la pudeur et l'humilité de l'éternelle débutante, la probité, l'honnêteté et la rigueur de l'artisan d'un bel ouvrage, qui met un point d'honneur à être à la hauteur de la mission qui lui est confiée. Vous êtes d'une curiosité rare, d'un appétit jamais rassasié, pour les nouveaux auteurs, les nouveaux comédiens, les nouveaux metteurs en scène, les nouvelles productions, sans préjugé ou restrictions préalables. Avec vous point de " C'était mieux avant" ou " De mon temps ... " Voilà que vous fêtez en ce mois de juin 2014 vos 100 ans et vos 80 ans de carrière, et votre appétit de découverte n'a pas pris une ride, de salles de théâtre en salles de projection. Vous êtes chaque jour depuis 80 ans de plain-pied dans le présent des évolutions et mutations de cette profession de comédienne, dans laquelle vous avez rêvé et choisi d'entrer, avec détermination, par vocation, presque comme on entre en religion. Je dis presque eu égard à votre magnifique famille, tribu unie et soudée qui s'inscrit dans une incroyable lignée d'artistes (si l'on parle du dernier des Mohicans, il semble et c'est tant mieux que ce ne sera jamais le cas des Casadesus !). Gisèle Casadesus : profession comédienne. Mais une profession de foi en quelque sorte. Et qui dit foi dit Lumiére, et qui dit Lumière dit Grâce, et qui dit Grâce dit Espoir, qui dit Espoir dit Sourire et qui dit Sourire... Voilà, j'y reviens... Quelques mots échangés avec vous, c'est une cure de vitamines de toutes les lettres de l'alphabet, associée aux bienfaits des mantras tibétains. On se sent plus fort et invincible.
Chère Gisèle, le savez-vous ? Comédiens, metteurs en scène, auteurs, directeurs de théâtre, spectateurs, nous avons tous une relation privilégiée avec vous, réelle ou rêvée, espérée ou fantasmée. Pour résumé en paraphrasant un auteur de chanson bien connu, on a tous en nous quelque chose de Gisèle Casadesus.
Pour tout cela au nom de tous MERCI.
Il y a 80 ans, vous jouiez Beaumarchais dans la Grande Maison, aujourd'hui ce même Beaumarchais, entouré de tous les auteurs dont vous avez porté haut les mots, vous remet sa médaille. Je gage qu'il accompagne son geste... d'un sourire. »
Didier Long
photo : LN Photographers-SACD