France Télévisions : « Le téléspectateur ne comprend pas pourquoi il peut voir une fiction en rattrapage et pas un film »
La SACD recevait le 10 mai sur son stand cannois les directrices de France 2 et France 3 Cinéma.Pour inaugurer ses premières rencontres cannoises, la SACD a reçu les directrices de France 2 et France 3 Cinéma, Valérie Boyer et Cécile Négrier. L’occasion a été donnée aux deux responsables du service public de rappeler le rôle important joué par France Télévisions. Avec une obligation d’investissement dans le cinéma de 3,5% de son chiffre d’affaires, France 2 et France 3 y consacrent chaque année près de 60 millions d’euros pour une trentaine de films chacune (22 millions d’euros pour France 3 ; 35 millions d’euros pour France 2).
Sans avoir de critères trop rigides, les investissements se répartissent pour moitié entre des films d’auteurs dont l’ambition est d’être selectionnés dans des festivals et des films qui ont vocation à alimenter les antennes des chaînes. La diversité est un maître mot de la ligne éditoriale des deux filiales. Du côté de France 2, la volonté est en particulier d’accompagner les films orientés vers les familles et le grand public mais aussi d’accompagner des auteurs sur le long cours et de prendre part aux débats qui animent la société.
Chaque année, près de 400 scenarios sont reçus. Pour valider définitivement les choix effectués par les filiales, un comité au sein duquel siègent également la présidente de France Télévisions, le directeur des programmes et les antennes de France 2 et France 3 a été mis en place depuis 2 ans.
Le contexte actuel est marqué par trois tendances principales :
- une réduction des investissements de Canal+ qui a provoqué une croissance du nombre de projets soumis à France Télévisions et une plus grande difficulté pour les producteurs de monter des projets. Pour autant, les deux responsables ont souligné que leurs filiales « n’avaient ni la vocation ni les moyens de pouvoir suppléer à cette désaffection des financements ». Malgré tout, sur quelques projets, France Télévisions a accru ses financements. C’est le cas notamment sur le nouveau film de Stephane Brizé, En Guerre, en compétition à Cannes.
- des films qui « arrivent essorés a l’antenne ». Pour Valérie Boyer, les fictions, qui connaissent des audiences florissantes sur le service public, ont la chance d’arriver fraîches à l’antenne et sans avoir été vues auparavant. Ce n’est pas le cas pour les films qui arrivent un peu essorés, souvent plus de 30 mois après leur sortie en salle et après de multiples exploitations sur le payant. Du côté de France 3, « sur la case cinéma, on souffre un peu », même si la comédie est un genre qui fonctionne bien. Une constante se dégage pour les audiences : elles sont souvent corrélées aux succès des films en salle.
- une absence préjudiciable des films sur la télévision de rattrapage. Engagée dans des discussions avec les organisations professionnelles depuis plusieurs années, France Télévisions n’a pas toujours obtenu d’accord collectif prévoyant la possibilité de diffuser les films en télévision de rattrapage. C’est d’ailleurs le seul genre qui en est absent aujourd’hui. Cécile Négrier a regretté cette situation. Pour elle, « il faut à tout prix éviter que le cinéma soit déréférencé. Il y a urgence, nous nous tirons une balle dans le pied. Le téléspectateur ne comprend pas pourquoi il peut rattraper une fiction et pas un film. »
Pascal Rogard, qui animait la rencontre, a tenu à a souligner cet anachronisme qui rappelle aussi l’impasse actuelle sur la chronologie des médias et l’impossibilité de faire évoluer les règles de diffusion des films, malgré 7 ans de discussions professionnelles.