Cinéma 04 juin 2014

Jean-Claude Carrière salue la mémoire de Henning Carlsen

Le cinéaste danois est décédé le 30 mai dernier.

Celui qui vient de nous quitter était un cinéaste danois, donc nordique. Aucun doute : Dreyer, Sjöstrom, Bergman faisaient partie de sa famille. Son film le plus célébré, La Faim, est adapté d’un roman de Knut Hamsun, et l’histoire rapporte que Per Oscarsson, acteur bergmanien, fit à pied le trajet Suède-Oslo afin d’arriver sur les lieux du tournage très amaigri, comme le demandait son rôle d’affamé.

Henning avait le teint clair, les yeux bleus et limpides. Il vivait à Copenhague, marié à une Norvégienne. Un homme du Nord, à coup sûr.

Mais sa curiosité, d’un bout à l’autre de sa longue vie, est restée multiple. Francophone, il a tourné en France Un Divorce heureux, et son dernier film, Mémoires de mes putains tristes, d’après le roman de Garcia-Marquez, en espagnol, au Mexique. Du cinéma, de ses gloires et de ses déboires, de ses lumières et de ses ombres, il a tout connu, je crois. Esprit étonnamment ouvert, alerte, drôle, toujours aux aguets, toujours en mouvement, il a vécu à l’intérieur même de cet art qu’il aimait, comme s’il en faisait partie. Il a même été distributeur et exploitant de salles, au Danemark, pendant des années.

Pour ceux qui recherchent un film de lui assez peu connu, mais qui nous parle secrètement de ses désirs, de ses joies, de ses craintes, je recommande Comment faire partie de l’orchestre. Un orchestre qui devra désormais jouer sans lui, et à qui, j’en suis convaincu, il fera défaut.

Jean-Claude Carrière